L'Ouganda abrite l'une des populations les plus jeunes du monde, avec plus de 78 % de personnes âgées de moins de 30 ans. Malgré cette situation, les séquelles du conflit non résolues, ainsi que les perceptions selon lesquelles les jeunes sont « jeunes » et prédisposés à la violence, ont eu un impact (et continuent d'avoir un impact) sur celles-ci directement et indirectement. Les principaux problèmes auxquels ces personnes sont confrontées rassemblent l'exclusion des processus qui ont des conséquences directes sur leur vie, justifiée par la culture et leur jeune âge, qui est souvent associée à un manque d'expérience et à une incapacité à diriger, et la connaissance limitée qu’elles possèdent des politiques et des cadres clés qui reconnaissent, garantissent et protègent leur droit à la participation aux processus de leadership, de paix et de développement. En conséquence, les jeunes sont rarement considérés comme des partenaires dans divers processus, malgré l’existence de politiques et de lois prévoyant leur engagement, les privant ainsi de voix, d’action et de leadership. Cette a grandement contribué à l’existence de nombreux jeunes dotés de compétences et de connaissances limitées pour s’engager dans les processus de leadership, de paix et de développement.

Le programme Dialogue transfrontalier et autonomisation des jeunes pour la paix dans la région des Grands Lacs mené par Interpeace vise à promouvoir le leadership des jeunes dans les processus de consolidation de la paix aux niveaux régional, national et local en République démocratique du Congo (Nord-Kivu et Sud-Kivu), au Rwanda, au Burundi et en Ouganda en renforçant les capacités de ceux-ci par la formation. Le programme est soutenu par l'Union européenne et la Coopération suisse au développement et mis en œuvre par l’organisation et ses partenaires locaux, dont le Pole Institute, Never Again Rwanda (NAR), le Centre d'alerte et de prévention des conflits (CENAP), Action pour la paix et la concorde (APC), le Refugee Law Project (RLP) et Vision jeunesse nouvelle (VJN).

Dans le cadre du programme, le Refugee Law Project a organisé une formation d'une semaine à Entebbe, en Ouganda, en mai 2023. Celle-ci a été suivie par 18 Peace Fellows et cinq jeunes sélectionnés. La session visait à améliorer les compétences générales des participants, telles que la communication et la pensée critique, ainsi que les compétences techniques, telles que la conception de projets et le plaidoyer. L'apprentissage entre pairs a été encouragé pour favoriser l'interaction et le réseautage. Les formateurs rassemblaient des membres du Refugee Law Project, des formateurs de formateurs (ToT) encadrés par Interpeace, des mentors en Ouganda, des praticiens d'institutions partenaires et certains des Peace Fellows eux-mêmes qui ont co-animé les sessions. La formation en personne a offert une plateforme sécurisée pour le discours civique, le réseautage et l'échange de connaissances. Elle a permis aux jeunes d’établir et de mettre en œuvre leurs initiatives de consolidation de la paix, d'approfondir leur compréhension des concepts de paix et d'améliorer leurs compétences en communication.« Pour moi, les 7 C de la communication ont été une révélation ; c’était très important pour moi car j’ai réalisé que c’était une compétence dont j’avais besoin pour ma communication quotidienne et j’apprends tout cela en dehors de l’école, pendant mes études universitaires », a déclaré un jeune Peace Fellow.

Nelson Mandela avait raison de reconnaître l’éducation comme l’arme la plus puissante pour changer le monde. Donner aux jeunes les moyens de contribuer à la paix facilite des partenariats significatifs et une prise de décision au sein de leurs communautés. Le mentorat complète la formation formelle en encourageant la découverte de soi et la croissance. Grâce à des efforts collectifs, y compris le mentorat, Interpeace et ses partenaires responsabilisent les jeunes, pour qui la moitié du succès se prépare.

C’est une avancée progressive vers l’éradication des stéréotypes identitaires entre les jeunes de la province de l’Ituri au Nord-Est de la République démocratique du Congo (RDC). En juillet dernier, ils étaient des centaines présents dans la ville de Bunia lors des élections du nouveau comité du Conseil provincial de la jeunesse. Sur la liste, dix postes étaient à pourvoir.

Sous les applaudissements de l’assemblée, Bungamuzi KUKWABO Déogratias a été élu président avec 18 voix sur 37. Premier parmi les quatre candidats en lice, il pense que la tâche est désormais facile avec un dialogue tenu du 20 au 22 juin 2023 pour mettre en face les jeunes issus de toutes les communautés de cette région. « Ce dialogue était une véritable opportunité de regrouper en même temps les auteurs et les victimes de l’insécurité. Dans la foulée, il était facile d’identifier des jeunes membres de certains groupes armés » a-t-il reconnu. Pour lui, l’impact de ces assises est déjà visible. « Les membres du comité que je dois diriger après notre installation d’ici quelques jours par le gouverneur de province est constitué des jeunes issus presque de toutes les communautés de l’Ituri », a-t-il fait savoir.

L’organisation de ces élections faisait partie des recommandations du dialogue des jeunes sous l’appui technique du consortium médiation composé des ONG Interpeace, Action pour la paix et la concorde et Pole Institute, de même que de l’Université de New York, avec le financement de l’Union européenne.

Cette activité regroupait uniquement des jeunes pour obtenir leur implication dans le processus de consolidation de la paix dans cette partie du pays. Et c'est fait ! Ils se sont engagés pour changer la donne en se mettant d’accord pour mettre fin à la crise de leadership au sein de leur conseil provincial.

« Il y a une ou deux semaines, j’ai effectué une mission à Kasenyi au bord du Lac Albert. J’ai été émerveillé de retrouver les jeunes venus des différentes entités utilisant un même moyen de transport pour prendre part à une activité organisée en leurs faveur. Il était presque impossible avant ces assises de voir par exemple un jeune des Bahema-Boga prendre à bord de sa moto un jeune des Walendu Bindi», se réjouit le nouveau président de la jeunesse.

A la clôture de ces assises de trois jours à Bunia, le directeur adjoint de cabinet du gouverneur en charge de l'économie et finances, Steve Sengida, au nom de celui-ci, était déjà clair. « Nous devons avoir honte du retard de notre province sur le plan développement. Le temps est venu de tourner le dos aux manipulateurs. Les récalcitrants ne devront que faire face à la justice ou à la neutralisation », a-t-il insisté.

Pour le président du conseil local de la jeunesse de Bedu Ezekere, dans le territoire de Djugu, c’est la première fois que des jeunes spécialement sont appelés dans ce genre d'activité. « Je pense que la paix doit continuer. Je remercie les organisateurs », a laissé entendre Lotsima Dhembu Kabose.

A la fin de cette réunion, les jeunes de toutes les structures issues de cinq territoires de la province de l’Ituri ont signé un acte d'engagement, après un plan d'actions concrètes dans le processus de paix. Pour marquer leur soutien aux processus de paix, ils ont même allumé, par l'entremise de leurs représentants, des « bougies » en guise de « lumière de paix ».

« La paix, c'est un combat de nous tous », a rappelé l'un des participants. Lors de travaux, les éléments de cohésion entre les jeunes des différentes communautés ont été évoqués. L’objectif était de dénicher les facteurs de division, de cohésion et des actions concrètes à mener par ces personnes, hommes et femmes mêlés. « Nous, en tant que jeunes, nous sommes auteurs et responsables de tout problème que traverse la province de l'Ituri. C'est la prise de conscience d'abord et revenir à la responsabilité pour nous désolidariser des antivaleurs », a indiqué le président du conseil territorial de la jeunesse de Mahagi, Unyuthfwa Nyangambe Jean Claude. Plus de 400 jeunes ont pris part à ces assises, organisées par l'ONG Interpeace en collaboration avec le gouvernement provincial, la coordination provinciale du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS) et le groupe consultatif de médiation (GCM). A leurs côtés se trouvaient certains députés provinciaux, membres de confessions religieuses, autres ONG locales, nationales et internationales. Cette activité s’inscrit dans le cadre du projet « Soutien à la méditation et la résilience pour la paix en Ituri et au Grand Nord-Kivu ».

Les campus universitaires ivoiriens sont, depuis la fin des années 1990, constamment agités par des épisodes de violence. Lorsque ce ne sont pas les étudiants qui, par mouvements syndicaux interposés se confrontent, ce sont les tensions entre ceux-ci et les forces de l’ordre qui débouchent immanquablement sur des dégradations d’infrastructures universitaires, la destruction de biens de particuliers et, pire, des pertes en vie humaine. Aujourd’hui, les victimes de cette violence ne se comptent plus. Et l’impunité dont semblent jouir les auteurs questionne tout autant que la capacité de la réponse apportée par les autorités et les différents acteurs, alternant répression et tentatives de médiation, à répondre aux causes structurelles de celle-ci.

Pour tenter de mieux comprendre les dynamiques alimentant ce cycle quasi ininterrompu de tensions et de violence, de sorte à mieux les prévenir, Interpeace et son partenaire Indigo Côte d’Ivoire ont conduit un processus de Recherche action-participative (RAP) sur la question. En 2021 et 2022, étudiants, mais aussi enseignants, personnel administratif et décideurs ont été engagés dans une réflexion collective et de dialogue dans trois universités publiques du pays, celles de Nangui Abrogoua à Abobo-Adjamé, Alassane Ouattara à Bouaké et Félix Houphouët-Boigny à Abidjan-Cocody.

La recherche a été soutenue par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) avec le financement du Fonds de consolidation de la paix des Nations Unies. Elle a pu s’appuyer sur la collaboration du Ministère de la réconciliation et de la cohésion nationale et du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (MESRS).

Première observation révélée par cette approche, il serait erroné de penser que la violence n’est due qu’aux affrontements épisodiques entre étudiants. Les causes sont multiples : elles tiennent tout à la fois de dynamiques internes au campus, mais aussi d’influences qui peuvent être attribuées à des acteurs extérieurs et autour de l’université. Au-delà des rivalités syndicales déjà bien documentées, des problèmes de gouvernance académique, d’accès aux prestations culturelles ou de pouvoir alimentent des pertes humaines, des destructions matérielles ou des violences sexuelles et économiques. Face à ce diagnostic, il semble nécessaire de prévoir des mécanismes de médiation et de dialogue réellement inclusifs.

C’est d’autant plus le cas que ce fonctionnement constitue même un symptôme des modes de revendication des syndicats universitaires. Une véritable « culture de la violence » faire partie de l’action collective de ces mouvements qui affirment ne pas être entendus s’ils n’y recourent pas. Mais cette approche provoque surtout des inégalités face aux services universitaires, une concurrence pour l’accès aux ressources et des blocages imposés, si besoin est par la force, autant à l’administration qu’aux membres-mêmes de ces organisations syndicales. Davantage de dialogue et de représentation démocratique doivent être garantis. Face à l’impunité et à l’insécurité, le personnel enseignant, administratif et technique offre de moins bonnes prestations.

Plus exposées aux menaces, les jeunes femmes sont parfois poussées à abandonner leurs études universitaires face aux violences sexuelles et basées sur le genre (VSBG) qu’elles subissent, en raison d’un climat de quasi-impunité et des conditions d’études difficiles. Certaines sont contraintes de dormir dans les amphithéâtres et de se laver dans les toilettes universitaires, en l’absence d’un logement adapté. Harcèlements sexuels et viols sont régulièrement observés dans cet écosystème universitaire. Les responsables de ces actes peuvent être des étudiants ordinaires ou des personnes en position de pouvoir, comme des enseignants, des responsables de mouvements étudiants et du personnel encadrant. Les dispositifs de prévention, de même que les mécanismes de signalement et de prise en charge des victimes, sont insuffisants ou parfois inexistants.

Au-delà des problèmes liés aux acteurs relevant directement de l’environnement académique, certains entrepreneurs politiques portent également une part de responsabilité. En parrainant certains syndicats universitaires, ils obtiennent en retour une masse de soutiens face à leurs rivaux dans la compétition politique nationale, certains étudiants intervenant comme prestataire de violence dans le champ politique. Cet adoubement protège souvent également ces jeunes de sanctions et de toutes formes de condamnations pour les actes délictueux dont ils se rendent coupables sur les campus universitaires, renforçant là encore l’impunité. Autre source de tensions, un syndicat peut parfois être convoité par deux entrepreneurs politiques, ouvrant le champ à une lutte de contrôle.

Face à ces difficultés, la recherche recommande davantage de mécanismes de lutte contre l’impunité et une gouvernance universitaire plus inclusive et basée sur la concertation. Des associations tentent depuis plusieurs années de réduire la violence universitaire. Mais elles ne se penchent pas sur les causes structurelles et sont souvent ostracisées par les syndicats. Leur rôle doit être valorisé et un dialogue doit être mené entre ces différents acteurs.

« Par le dialogue, l'écoute bienveillante et la conciliation, il est possible de mettre en place une gouvernance inclusive des différentes sensibilités qui composent le monde universitaire et, partant, assécher les terreaux fertiles sur lesquels prospère la violence sur nos campus», affirme le Dr Séverin Kouamé, sociologue et directeur exécutif d’Indigo Côte d’Ivoire.

Dans les trois institutions où la recherche a été menée, de plus en plus de personnes parmi les parties prenantes, qu’elles soient responsables de violences ou victimes, demandent un changement d’attitude. Le moment est venu de « pacifier durablement » les universités ivoiriennes.

 

Les Maliennes n’ont pas encore pu donner leur plein potentiel comme agentes du changement dans leur société. Beaucoup d’entre elles œuvrent pour davantage de prestations sociales dans les communautés et pour améliorer la cohésion et la consolidation de la paix. Mais trop souvent, leur engagement citoyen se heurte à des obstacles qui ne leur permettent pas d’y remédier. Parmi ceux-ci, le poids des normes socioculturelles, le manque d’accès à l’éducation et leur absence dans la prise de décision limitent les avancées pour elles sur cette question.

En réponse à cette situation, Interpeace et son partenaire local Aide au Développement Durable (ADD) ont officiellement lancé le projet "Voix des femmes : amplifier l'engagement citoyen et le rôle des femmes en agents de changement au Mali", financé par l'Union européenne (UE), à Bamako le jeudi 13 juillet. Jusqu'en 2025, les organisations de femmes du nord du pays, du centre et de la région de la capitale seront soutenues dans le renforcement de leurs capacités organisationnelles. Le dialogue avec les chefs traditionnels et les autorités sera élargi. Des actions de plaidoyer seront menées auprès d'un certain nombre d'acteurs clés afin d'accroître le rôle de ces femmes dans la construction de la paix.

Parmi les discours au lancement du projet, la représentante de la ministre de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille, Ndeye Sow, conseillère en charge de l’autonomisation des femmes a relevé que le projet « vient à point nommé car il répond parfaitement aux soucis des plus hautes autorités de la transition pour l’émergence d’un Mali nouveau ». "On ne peut que se réjouir de cette initiative salvatrice", a-t-elle ajouté.

Présent pour la cérémonie, le maire de la commune du district de Bamako,Oumarou Togo, a invité Interpeace, son partenaire ADD et tous les acteurs à investir « pour faire de ce projet un succès inouï au bénéfice des organisations féminines de la société civile cibles ». La réussite de « Voix de femmes » dépendra de « l’implication effective de l’ensemble des parties prenantes à tous les niveaux », a fait remarquer de son côté la directrice régionale d’Interpeace, Maria Alessia Polidoro.

Un engagement qui n’est de loin pas une première pour Interpeace dans le pays. Présente depuis 2013, l’organisation avait déjà mené une vaste évaluation des défis du Mali pour la consolidation de la paix. Dans cette recherche action-participative (RAP) auprès de plus de 5000 personnes dans huit régions du pays et dans des camps de réfugiés dans trois Etats voisins, elle avait identifié les principaux obstacles à des avancées, ceux de l’érosion des valeurs sociétales, le manque d’accès des jeunes à l’emploi, les problèmes de gouvernance et l’insécurité.

Depuis, plusieurs projets ont été établis, dont « Voix de femmes » pour le plus récent. Pour garantir une large implication, des comités consultatifs régionaux et nationaux seront lancés pour guider toutes les initiatives et activités qui seront menées. Avec toujours comme objectif de faire entendre davantage au Mali la voix des femmes.

 

Le génocide de 1994 contre les Tutsi au Rwanda a eu des conséquences importantes sur la santé mentale, la cohésion sociale et le développement socio-économique. En 1996, environ 130 000 individus soupçonnés d'avoir participé avaient été arrêtés et détenus. L’une des conséquences majeures du génocide a été les graves problèmes de santé mentale rencontrés par les survivants en raison des horribles atrocités commises contre eux et leurs proches. Des études récentes ont conclu que même les condamnés pour ces violences subissent diverses détresses psychologiques en raison des atrocités qu'ils ont perpétrées et de leur incarcération, ce qui rend leur réintégration effective dans leur famille et leur communauté après leur libération assez complexe.

"J'ai été profondément traumatisé par ma vie difficile en prison et j'étais trop en colère contre ma famille parce qu'ils ne se souciaient pas de moi comme je l'aurais souhaité", a déclaré Edi (pseudonyme), un condamné pour génocide détenu à la prison de Bugesera. installation située dans la province orientale du Rwanda.

Le cas d’Edi n’est pas isolé, puisque son collègue Alpan (pseudonyme) a également souffert d’une profonde dépression et d’un isolement social pendant plus de 27 ans. « Je me sentais traumatisé et anxieux chaque fois que je pensais à ce que j'avais fait pendant le génocide et à la façon dont j'avais déçu ma famille et ma communauté. Ici, je ne voulais parler à personne et je m’étais désintéressé de tout car je pensais que ma vie n’avait aucun sens », raconte-t-il.

Un nombre important de personnes reconnues coupables de crimes de génocide ont déjà été libérées ces dernières années. Selon les études d’Interpeace, elles sont susceptibles de provoquer des tensions et de l’anxiété parmi les familles des survivants du génocide et dans la communauté en général, pouvant conduire à la récidive. L’incapacité à garantir leur réadaptation psychologique efficace constitue un obstacle majeur aux progrès en matière d’unité et de réconciliation, 29 ans après les atrocités.

Depuis 2020, Interpeace et ses partenaires locaux, Dignity in Detention Organisation, Haguruka et Prison Fellowship Rwanda, avec le soutien financier de l'Union européenne et du gouvernement suédois, mettent en œuvre un programme holistique de consolidation de la paix qui simultanément aborde la santé mentale , favorise la cohésion sociale et renforce les moyens de subsistance économiques, avec un accent particulier sur la réadaptation psychologique et la réinsertion des prisonniers.

 

Impact des espaces de guérison de sociothérapie en prison

Interpeace, en collaboration avec ses partenaires locaux, a établi des espaces de guérison par sociothérapie dans cinq prisons, à savoir Bugesera, Nyamagabe, Musanze, Nyagatare et Ngoma, afin de fournir aux détenus sur le point d'être libérés des services de soutien psychosocial de groupe.

Après un processus de sélection rigoureux visant à évaluer leur niveau de détresse et leurs besoins, les détenus en voie de libération sont répartis en groupes de 12 à 15 membres chacun. Guidés par des codétenus bien formés, ils s'engagent dans des dialogues de guérison qui durent 15 semaines. Menés dans un espace sécuritaire et un environnement propice, ceux-ci simulent la guérison mutuelle, la tranquillité d’esprit et la cohésion.

« Les espaces de guérison en sociothérapie m'ont permis de réaliser qu'être en prison n'est pas la fin de ma vie. Avant, j’étais désespéré et je pensais que ma vie n’avait aucune valeur. Mais maintenant, j'ai retrouvé le sentiment d'un avenir meilleur après ma libération, qui est prévue dans moins de deux ans », a déclaré Alpan, qui a ajouté : « ils m'ont aidé à renouer avec celui que j'ai offensé. Nous nous parlons souvent au téléphone et je me sens prêt à lui demander pardon après ma libération ».

Comme ses codétenus, les espaces de guérison par sociothérapie ont permis à Edi non seulement de faire face à ses détresses et de renouer avec sa famille mais aussi de vivre en paix et en harmonie avec les autres prisonniers. En juin 2023, le premier groupe de 182 détenus a obtenu son diplôme dans les espaces de guérison de quatre prisons. Auparavant, plus de 50 ont obtenu leur diplôme au cours d'une phase pilote du programme mis en œuvre dans le district de Bugesera, à l'est du Rwanda, de 2020 à 2022. Selon l'objectif du programme, trois groupes obtiennent leur diplôme chaque année. Ceux qui sortent des espaces de guérison acquièrent des compétences pratiques qui les rendent mieux équipés pour lancer des opportunités de subsistance et gagner leur vie après leur libération.

Formation des agents correctionnels sur la mise en œuvre du programme

Interpeace a travaillé avec le Service correctionnel du Rwanda (RCS) pour élaborer un programme standardisé de réadaptation et de réintégration des prisonniers, qui a été adopté en juillet 2022. Le dispositif œuvre comme guide pour harmoniser le processus dans tous les établissements pénitentiaires et est mené par des agents correctionnels formés.

Du 5 au 11 juin, RCS, avec le soutien d'Interpeace, a organisé une formation de formateurs pour 45 agents correctionnels sur la mise en œuvre du programme. Les participants ont été sélectionnés dans des établissements correctionnels de tout le pays. Ceux qui terminent la formation formeront également leurs collègues en service. Le directeur des prisons Alain Gilbert Mbarushimana, l'un des participants, a salué la formation, déclarant qu'elle a renforcé leur capacité à mieux accompagner les détenus.

« Au cours de cette formation, nous avons appris diverses approches innovantes en matière de réhabilitation des détenus. Je suis convaincu que cela nous permettra d’aider efficacement les détenus à devenir de meilleures personnes. Nous nous sentons pleinement équipés pour partager nos connaissances et nos compétences avec nos collègues de tous les établissements pénitentiaires », a déclaré le surintendant Mbarushurishama.

Lors de la cérémonie de clôture de la formation, le commissaire des prisons Jean Bosco Kabanda, responsable de la Division éthique et doctrine au RCS, a souligné l'importance de celle-ci pour permettre à l'institution de remplir son mandat de réhabilitation des détenus pour qu'ils deviennent de meilleurs citoyens.

Il a également révélé que le programme sera associé aux cours de l’école de formation du RCS proposés au personnel nouvellement recruté et aux cours de recyclage destinés aux officiers en service.